Avec ses 200 médecins et ses 1800 professionnels, le Centre Hospitalier de Calais offre des soins de qualité reconnue dans les domaines de la médecine, de la chirurgie, de l’obstétrique, des soins de suite, de la santé mentale et de l’accompagnement des personnes âgées. Membre du GHT Côte d'Opale, le Centre Hospitalier de Calais a une capacité d'accueil de près de 1000 lits, et compte plus de 280 000 journées d'hospitalisation en 2020. Laurent Bacquet, Responsable du Contrôle de Gestion au Centre Hospitalier revient sur son expérience de la solution Hospivision du Groupe PSIH qu'il utilise depuis 2018.
La place des outils de BI et plus précisément leur exploitation est encore timide au sein des établissements de santé, à comparer au secteur privé dans lequel vous avez eu l’occasion de travailler de nombreuses années. Que pourriez-vous nous en dire ?
Dans le privé, la BI et l’analyse des données est quelque chose de répandu depuis assez longtemps, avec des attentes fortes où l’on analyse beaucoup les données de production et commerciales pour pouvoir s’améliorer en continu. Il n’est pas envisageable par exemple de perdre un euro de chiffre d’affaires. La réactivité est très importante dans un monde concurrentiel. La Business Intelligence a vraiment fait évoluer le métier de contrôleur de gestion : on passait auparavant beaucoup de temps à la production de données et moins à l’analyse, et la BI permet d’inverser cette tendance pour nous permettre de nous concentrer sur l’analyse de données, c’est donc un enjeu majeur pour notre métier.
La BI permet d’inverser cette tendance pour nous permettre de nous concentrer sur l’analyse de données, c’est donc un enjeu majeur pour notre métier.
Dans les établissements de santé, il y a beaucoup de logiciels différents, avec chacun leur fonction propre, et qui ne communiquent pas assez entre eux. La réactivité est moins importante, tout changement peut prendre du temps. De plus, selon moi, les formations pourraient être plus approfondies afin d’éviter que nous passions beaucoup de temps sur ces différents logiciels pour les comprendre et les maîtriser.
Parmi les logiciels de Calais, il y a la solution décisionnelle du Groupe PSIH que je ne connaissais pas auparavant et qui m’a plu de suite car elle correspondait à ce que je connaissais dans mes expériences précédentes et que je recherchais à l’hôpital : pouvoir croiser les données pour les exploiter et prendre de meilleure décisions.
Aujourd’hui, la BI n’est pas encore au niveau d’exploitation que l’on pourrait espérer mais nous sommes sur la bonne voie.
Qu'est-ce qui explique cette sous exploitation ?
Il y a un manque évident de formation en interne. On a beaucoup de logiciels mais, si on ne les utilise pas régulièrement, on oublie rapidement comment les utiliser.
Le turnover des effectifs peut aussi expliquer une certaine déperdition de savoir s’il n’y a pas de transfert de processus ou de procédures écrites.
De plus, il y a un vrai travail à faire sur la culture médico-économique qui passe par la communication entre services au sein des établissements de santé.
Le médico-économique est souvent interprété comme une “réduction des budgets” et le sujet du contrôleur de gestion alors que ce n’est pas le cas. Il faut donc acculturer sur son réel enjeu. On peut illustrer au travers de l’exemple de l’impact de l’imputation des charges pour avoir des états financiers au plus juste : la bonne dépense dans la bonne UF. Leur expliquer que la bonne affectation est importante pour l’étude d’investissement d’un nouvel équipement est par exemple de nature à les sensibiliser.
Il y a un vrai enjeu pédagogique de compréhension du domaine médico-économique et les utilisateurs ont besoin d’être rassurés sur la fiabilité des indicateurs et des données exploitées via la BI.
Quand je me suis rendu compte du manque de confiance envers la donnée et du manque de compréhension des indicateurs, nous avons effectué un travail avec les différents services pour redéfinir chaque indicateur ensemble afin de se mettre d’accord sur la définition, en se référant la plupart du temps aux définitions officielles. J’ai ensuite créé un lexique complet : la définition, la fréquence de rechargement de la donnée sur tous les indicateurs pour ensuite les adapter à chacun des pôles en fonction de leurs problématiques propres.
L’objectif était de montrer la fiabilité des données et des indicateurs pour les rassurer et les motiver. Le but final étant d’avoir un Tableau de Bord qui réponde à leur besoin.
Aujourd’hui, grâce à ce travail, plus de 95% des informations essentielles sont intégrées dans leur tableau de bord de pôles. Historiquement, on était sur des PDF, aujourd’hui nous sommes sur des données dynamiques en quasi temps-réel.
La plupart des analyses, si elles se font, se font encore en silos, votre avis là-dessus ? est-ce trop cloisonné ?
En effet, je constate que l’hôpital est scindé encore trop souvent en deux : il y a le milieu médical et le milieu administratif, ce qui contribue à ces analyses en silos.
Les médecins ne voient pas toujours que la BI peut leur servir au quotidien. Alors qu’avec des indicateurs très simples, synthétiques et visuels (management visuel) qui parlent, avec des vrais plans d’action derrière, ils peuvent en retirer de belles choses dans leurs pratiques professionnelles.
Les médecins ne sont pas encore habitués à cela et c’est par cette culture qu’adviendra la réussite du médico-économique.
Pour faciliter cette culture, l’hôpital a créé des pôles basés sur des trios :
1 – Chef de pôle
2 – Cadre supérieur de santé
3 – Cadre administratif et/ou contrôleur de gestion
Il appartient bien au cadre administratif / contrôleur de gestion d’apporter cette vision et d’aider le pôle dans son quotidien avec des indicateurs compris de l’ensemble du personnel soignant. Des réunions de présentation sont programmées afin de présenter les tableaux de bord et aussi d’échanger avec la Direction.
L’analyse du Casemix par spécialité et par praticien permet d’apporter une visibilité sur leur activité et de voir par exemple, si nous perdons des parts de marchés par rapport aux autres hôpitaux.
Qu'est-ce qui inciterait à utiliser la BI de manière optimale et transverse ?
Les retraitements passent malheureusement encore trop souvent par Excel, alors que la BI permet de croiser de nombreuses activités : RH, GAM… et surtout, de gagner du temps. Il est important que les différents acteurs y trouvent leur intérêt, le gain de temps en est un.
La confiance dans la donnée est indispensable pour que les outils soient plus utilisés. D’où tout le travail de pédagogie à réaliser que je constate comme payant avec le temps.
C’est l’interprétation visuelle souvent qui permet de bien traduire ces croisements.
La BI a un rôle à jouer pour donner rapidement des indicateurs d’activité : meilleure utilisation de la RH, meilleure connaissance des données, meilleure efficience.
La réactivité est un facteur clef de réussite de l’utilisation et de la prise en main de la BI.
Encore une fois, c’est la confiance qui prime et le dialogue entre services : les données ne sont pas la responsabilité du CDG mais elles viennent de chaque personne qui les remplit : si elles sont mal remplies, il va être compliqué de comprendre l’activité des services et de les optimiser.
Il a fallu montrer au personnel médical que c’est un travail collectif pour faciliter des tâches répétitives en les automatisant, et aujourd’hui : ça paye.
La définition des rôles de chacun est également importante pour comprendre qui fait quoi afin d’avoir une BI avec des indicateurs pertinents et utilisables par tous.
Au Groupe PSIH, nous essayons de développer notre approche “accompagnement, conseil” justement, pour valoriser et optimiser les usages des solutions. Quels sont les atouts de la solution selon vous?
L’atout principal est le fait de pouvoir rassembler des indicateurs de domaines différents en un seul Tableau de bord.
La force d’un outil tel que PSIH est de donner ces indicateurs d’activité en graphique : un graphique parle à tout le monde, il fait ressortir les données de manière flagrante alors qu’un tdb chiffré peut parfois mal faire ressortir des infos essentielles.
Il faut des outils simples, rapides à mettre en place, qui leur parlent et qui permettent de contextualiser l’analyse sur des cas précis.
Les données doivent coller à la réalité, la notion de compréhension de l’importance des enjeux est donc essentielle.
Quels sont les enjeux futurs pour votre établissement ?
Il faut continuer à apporter cette culture “médico-économique” et avoir une communication plus facile, plus aisée au sein des pôles avec des graphiques simples accessibles à tous. Il ne suffit pas simplement d’afficher les données, il faut les expliquer. L’outil facilite cela.
Hospivision va également permettre d’élargir les études en croisant des données telles que les consommations médicotechniques et les GHM
Ensuite, nous aimerions développer les analyses avec le Département d’Information Médicale afin d’apporter plus de détails et de commentaires spécialisés.
Enfin, il faudra veiller à faciliter l’accès aux informations aux personnels soignants après avoir expliqué clairement les indicateurs et leurs objectifs.